HS ASH ETABLISSEMENTS

ETABLISSEMENTS

► Citoyenneté, quand la vulnérabilité fragilise les droits

 Citoyens à part entière

ÊTRE PRISE EN COMPTE.

Symbole par excellence de la citoyenneté, le droit de vote a été élargi en 2019 par la réforme du Code électoral pour que les personnes protégées – notamment celles porteuses d’un handicap mental – puissent avoir le droit de déposer leur bulletin dans l’urne (p. 8-9). Cette avancée attendue et saluée par tous ne doit toutefois pas occulter les freins nombreux d’une citoyenneté souvent empêchée (p. 4-5). N’est-il pas paradoxal que les usagers puissent s’exprimer sur des décisions locales ou nationales au cours des différents scrutins sans avoir la possibilité de faire valoir leur point de vue au quotidien (p. 30-31) ? Les personnes en grande vulnérabilité vivant en établissements sociaux ou médico-sociaux seraient-elles des citoyens de seconde zone ? Si la question interpelle, leurs (faibles) pouvoirs décisionnels ne peuvent qu’interroger. Ne pas avoir le choix, subir le quotidien et les décisions d’autres… Mais pour de bonnes raisons, diront certains, évoquant le sacrosaint : « C’est pour leur bien. »

ALLER VERS L'AUTODÉTERMINATION.

« On ne naît pas citoyen, on le devient. » C’est en tout cas la vision de certains, qui regrettent que ce sujet soit méconnu et n’intéresse ni les principaux intéressés, ni les professionnels (p. 12-13). L’éducation est-elle le parent pauvre du secteur ? La grande oubliée des projets personnalisés ? Et si la citoyenneté s’apprenait pas à pas ? C’est en lisant, en observant, en s’ouvrant aux autres, que l’esprit critique se développe. Or, force est de constater que la priorité en établissement ne se trouve pas (encore) dans la reconnaissance de l’autodétermination. Devenu à la mode, ce concept est encore insuffisamment relayé (p. 23). Quand une personne âgée vulnérable entre en établissement, la direction met à l’abri ses papiers et son argent liquide ; pour la protéger. Mais alors, comment peut-elle ensuite consommer et se déplacer en toute liberté (p. 26) ? Quand la surprotection et l’infantilisation ne font reconnaître que les incapacités, la citoyenneté recule (p. 4-5). Mais avant de prôner un changement de pratiques, un changement de vocabulaire (p. 29) semble devoir être un premier pas pour des personnes vues comme des patients, des résidents ou, au mieux, des usagers. Sans sentiment de chez-soi et sans maîtrise de son environnement, comment peut-on se positionner comme citoyen ? C’est tout l’enjeu du cadre domiciliaire qui doit se développer pour que la qualité de vie et la rupture de l’isolement social soient les deux piliers des établissements sociaux et médico-sociaux (p. 6-7).

FACILITER LE "FAIRE ENSEMBLE".

Prendre en considération l’avis des usagers et les impliquer ; autant de défis qu’il faudra relever pour que les pratiques changent et, avec elles, le regard porté sur le secteur. Certains ont d’ores et déjà fait le choix de la reconnaissance en expérimentant des comités de réflexion éthique participative (p. 27-28) ou en portant des actions coconstruites où le « faire ensemble » est la règle (p. 20). Cela est donc possible, à condition d’outiller les professionnels à grand renfort de Facile à lire et à comprendre (Falc) et autres pictogrammes (p. 16). Reste à généraliser leurs utilisations pour rendre le pouvoir aux personnes vulnérables. Finalement, que l’on soit très âgé, adulte en situation de handicap ou encore jeune avec des difficultés sociales, le besoin de reconnaissance est indispensable pour que la citoyenneté ou encore la République ne soient pas vécues comme des lieux communs lointains. L’enjeu est de renouer avec la confiance. Quand les personnes sont reconnues dans leurs capacités, leurs droits et leurs devoirs, alors elles peuvent (re)devenir actrices de leur vie. (p. 38-39).

  • Sommaire

ÉTAT DES LIEUX

  • L'enjeu d'une société plus inclusive, par Laurence Hardy, sociologue et anthropologue (P.4-5)
  • L'approche domiciliaire en Ehpad, Clémence Lacour, responsable des relations institutionnelles à la FNAQPA (P.6-7)
  • Le droit absolu de voter, Etienne Bataille et Muriel Cormorant, avocats (P.8-9)
  • Un réel lien social, Philippe Giafferi, ancien formateur et écrivain (P.10-11)

 

SUR LE TERRAIN

  • Agir en pleine conscience, Marcel Nuss, ancien formateur (P.12-13)
  • Mobiliser les professionnels et les usagers, Marie Etienne, ancienne responsable animation sociale en Ehpad (P.14)
  • Savoir écouter les usagers et leur famille, Peggy Forêt, directrice d'Ehpad public (P.15)
  • Gagner en autonomie, Sadek Deghima, responsable de service (P.16)
  • Respect du choix et de la dignité, Véronique Tapia, assistante de soins en gérontologie et formatrice (P.17)
  • Avec les autres, Manuela Deparis, monitrice-éducatrice (P.18-19)
  • Énergies collectives, Cyril Ciacnoghi, formateur (P.20)
  • Inclusion dans la cité par le travail, Olivier Pernelle, éducateur technique spécialisé (P.21-22)
  • Savoir écouter les choix des usagers, Jean-Luc Letellier, président fondateur du Crédavis (P.23)
  • "Bien vivre ensemble" dans un quartier multiculturel, Baptiste Choque, adjoint pédagogique (P.24-25)
  • Le résident, acteur économique, Richard Mesplède, animateur en Ehpad (P.26)
  • Des groupes de réflexion éthique dédiés aux usagers, Marion Villez, enseignante-chercheuse en sociologie avec la collaboration de Jean-Philippe Cobbaut directeur du centre d'éthique médicale de l'université catholique de Lille et de Jean-Luc Noël, psychologue clinicien (P.27-28)
  • Et si nous changions de vocabulaire ? Salomé Tonna, psychologue (P.29)

 

MISE EN PERSPECTIVE

  • "Quelques propositions pour les Ehpad, Louis Ploton, psychiatre et professeur émérite de gérontologie (P.30-31)
  • Si c'était à refaire, Laurent Garcia, cadre de santé et cofondateur de l'Observatoire du grand âge (P.32-33)
  • La démarche participative, Karine Lefeuvre, conseillère scientifique Fondation Partage et vie et vice-présidente du Comité consultatif national d'éthique, avec la collaboration de Lydie-Charlotte Pailler, chargée de mission, d'Anne-Laure Dubois, directrice multisite Fondation Partage et vie et de Tanguy Châtel, sociologue (P.34-35)
  • Médiation et accès aux droits, Thomas Pretot, directeur médiation France, Korian (P.36-37)
  • Une affaire éthique et technique, Karim Mahmoud-Vintam, cofondateur et délégué général Les Cités d'Or (P.38-39)
  • Panser la citoyenneté par nos vulnérabilités, Benoît Eyraud, maître de conférences en sociologie (P.40-41)

 

Hors-série ASH N° 19 - Juillet 2022 - 44 pages
11,50
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