Jeux et Maladie d'Alzheimer

► Adapter, partager et prendre du plaisir

A qui le tour ?

DU PLAISIR ET DES SOUVENIRS.

Se réunir à plusieurs autour d’une table. Partager du temps ensemble. Rire. Avec à la fin, un gagnant, triomphant et des perdants, ronchonnant et refaisant le match. Ce tableau, qui ne l’a pas joué un dimanche matin pluvieux, un soir où les programmes télé n’étaient pas très inspirés ? Entre amoureux, en famille, avec des amis ou des voisins. Le jeu, ou plutôt les jeux réunissent, sont fédérateurs de liens, presque toujours accompagnés de bonne humeur mais aussi parfois de disputes sur fond de mauvaise foi. Culturelles, intergénérationnelles, les parties de cartes, de petits chevaux, de Monopoly, de dames, de dominos, de mikados… ou pour les plus modernes de Wii nous renvoient tous vers des souvenirs plus ou moins anciens, plus ou moins enfouis. Les ainés n’y échappent pas. Et pourtant, en unité Alzheimer ou à domicile, le jeu n’est en rien une évidence. Il est même détourné de son objectif N°1, à savoir le plaisir pour privilégier les fameuses stimulations et autres médiations. Méconnue, l’activité ludique rencontre également de nombreuses difficultés et autres freins avec des professionnels pas toujours formés. Comment se positionner ? Quelle attitude avoir ? Comment réagir si les joueurs ne respectent pas à la lettre les règles ?

NE RIEN LAISSER AU HASARD ET SURTOUT PAS L'ADAPTATION.

Face à toutes ces interrogations, certains préfèrent ignorer cette animation qui pourtant remporte tous les suffrages quand elle respecte des fondamentaux : création de groupes homogènes selon le niveau et l’état d’avancement de la maladie. Aménagement de l’espace autour d’un lieu calme et sans distraction ou encore posture professionnelle bienveillante : savoir écouter les envies et les besoins des joueurs, apporter une solution personnalisée en adaptant les règles, avoir le bon ton -ne pas infantiliser un adulte vieillissant. Autant dire qu’il n’y a rien d’enfantin dans l’organisation d’une activité ludique. Les équipes le savent parfaitement. Face aux troubles cognitifs, aux difficultés d’apprentissage, de concentration, aux troubles du comportement, tout doit être préparé en amont et rien ne doit être laissé au hasard. Sauf la possibilité de changer le programme en ayant bien en tête la liste des jeux à oublier comme les quiz qui laissent entrevoir les déficiences et les différences pour privilégier ceux qui fédèrent. Place aux jeux de hasard, aux lotos, aux dessins collectifs qui ont l’intérêt de créer une parenthèse récréative et de lutter contre la désadaptation sociale.

LE PROFESSIONNEL, UN JOUEUR COMME LES AUTRES

De nombreux établissements ou structures d’accompagnement se sont saisis de cet outil. Une association a d’ailleurs choisi de professionnaliser des aides à domicile en formant des référents dédiés à la pratique du jeu. Des plateformes de répit misent sur le lien social en mettant à disposition de véritables ludothèques. Certains Ehpad laissent à portée de main des espaces dédiés dits « Méli-Mélo » pour que les résidents se prêtent au jeu quand ils en ont envie, d’autres valorisent les compétences en distribuant et institutionnalisant les rôles sociaux quand un pionnier marnais a depuis dix ans créé un espace d’animation nocturne où le programme dense permet aux couche-tard et autres insomniaques de jouer jusqu’au bout de la nuit, en attendant le sommeil. Alors oui, un professionnel attablé en train de jouer avec des personnes malades tout en buvant une tasse de thé est un professionnel qui travaille. Plus personne ne devrait en douter. Reste à garder à l’esprit que ce travail/jeu quotidien d’accompagnement doit être avant tout tourné vers le bien-être et le plaisir. Alors à qui le tour ?

  • Sommaire

ÉTAT DES LIEUX

  • Des je et des jeux, Philippe Giafféri, conférencier
  • Pour quelles finalités ?, Cédric Gueyraud, gérant FM2J, docteur en sciences de l’éducation
  • Le plaisir du « je », Judith Mollard, psychologue 
  • Animation salutaire, Professeur Louis Ploton, psychiatre
  • Pour un cadre ludique adapté, Cédric Gueyraud, gérant FM2J, docteur en sciences de l’éducation

     

SUR LE TERRAIN

  • Quand l’aide à domicile se spécialise, Elodie Lanez, responsable du pôle autonomie et prévention, association Aid’Aisne
  • La magie de l’instant, Delphine Maire, accompagnement par le jeu
  • Une porte d’entrée ludique, Amélie Barraud, neuropsychologue et responsable de plateforme répit et accompagnement UNA
  • La ludothèque pour faciliter le lien, Marie Etienne, pilote plateforme d’accompagnement et de répit ASSPO
  • Sentir et ressentir, Stéphanie Fleischner, auxiliaire de vie et animatrice
  • Un espace qui fait du bien, Véronique Tapia, formatrice et assistante de soins en gérontologie
  • Un outil de médiation, Abeline Moreau, directrice de la filière gériatrique du centre hospitalier de Troyes et Malala Ramanandraibe, médecin coordonnateur de l’Ehpad le Domaine de Nazareth
  • Méli-Mélo en UHR, Nathalie Benarroch-Queral, psychologue gérontologue
  • Un dé pour m’apaiser, Richard Mesplède, formateur et ancien animateur
  • Le Noctambule, la réponse adaptée, Françoise Desimpel, directrice d’Ehpad en retraite
  • Enrichissement réciproque, Maud Boin, psychologue
  • Adaptation comme maître-mot, Florence Dumas, psychologue en Ehpad
  • Un support de soin ludique, Stella Choque, formatrice
  • La chasse aux souvenirs est ouverte, Sarah Euvrard et Marion Truel
  • Le jouet Paro, Olivier Marousé, ergothérapeute CICAT Lorraine

 

MISE EN PERSPECTIVE

 

  • La poupée, objet de médiation, Béatrice Dussaud, infirmière, à l’initiative du mouvement international SlowCare
  • De l’intérêt de se former, Stéphanie Berteau, ludothécaire et formatrice FM2J
  • L’attribution de rôles sociaux, Lise Pottier, orthophoniste, formatrice, chargée d’enseignement à l’université de Lorraine
  • La table magique ou la stimulation par le jeu, Dominique Desjeux, anthropologue, professeur émérite à l’université Paris Cité
  • Quand la réalité se joue de nous, la bienséance voudrait nous voir rester sérieux ?, Judith Arnoult, formatrice en soins infirmiers et éthique médicale
Hors-Série ASH n°32 - Août 2023 - 44 pages
12,50
(ref: 1DALH0032)