VIOLENCE(S) EN ETABLISSEMENTS : LES PROFESSIONNELS EN PREMIERE LIGNE

► Les professionnels en première ligne

 Accepter la vérité

Un usager qui s’automutile, deux résidents qui en viennent aux mains ou encore un autre donnant des coups de poing au professionnel qu’il côtoie tous les jours. Autant de situations vécues par des personnels souvent démunis et déstabilisés. La violence au travail n’est pas nouvelle pour les équipes encadrant des personnes âgées ou en situation de handicap. Les faits sont recensés depuis 2005 par l’Observatoire national des violences en santé qui observe une constante : la quasi-absence de judiciarisation des faits et une complexité des causes (p. 4-5). Pathologies, addictions, refus de soins, environnement inadapté, équipes restreintes… les raisons sont nombreuses et difficiles à expliquer. Savoir exposer les maux vécus sur son lieu de travail constitue la première étape. Agressivité ou violence ? Pour adopter la bonne posture, les professionnels doivent pouvoir les différencier. Mais encore faut-il parvenir à prendre du recul. L’agressivité peut être un moyen d’expression pour des personnes qui ne peuvent pas ou plus s’exprimer (p. 8-9). Elle peut aussi être la conséquence d’un manque d’adaptation, une réaction face à une attitude vécue comme une agression. La question est de savoir comment ne pas mettre en échec une personne vulnérable dans un quotidien parsemé d’obstacles : manque de personnels, de temps, et parfois de compétences.

TOUS CONCERNÉS, TOUS ENGAGÉS.

Si les professionnels sur le terrain sont en première ligne, c’est à la direction d’être à l’initiative (p. 28-29). Au-delà des fiches d’événements indésirables et des traitements ou suivis connus de tous, la formation et la sensibilisation restent les garantes d’une meilleure préparation des professionnels et d’un accompagnement de qualité. Plus la pathologie et l’histoire de vie de la personne vulnérable seront connues, mieux le professionnel saura s’adapter. Il évitera des impairs qui peuvent se retourner contre lui (p. 15-16). Des outils sont par ailleurs à sa disposition face aux réactions incomprises et aux troubles du comportement ; un terme pas toujours employé à bon escient, ce qui génère un accompagnement complexe et parfois défaillant (p. 40-41). Au-delà de ce goût amer, de l’incompréhension qui saisit individuellement, c’est collectivement que viendront les bonnes réponses : pour parler le même langage, avoir les mêmes réflexes et postures, les équipes devront suivre une formation commune. Et le plus grand nombre, idéalement. Dans certains territoires, des sessions sont ouvertes aux professionnels accueillant les personnes âgées et en situation de handicap. Elles favorisent rencontres, échanges et apprentissages communs (p. 27).

CHANGEMENTS SOCIÉTAUX ET CONSÉQUENCES.

Savoir se protéger, choisir le lieu opportun, peser ses mots, adopter une posture d’écoute et d’empathie, tout en travaillant dans une structure où l’éthique est érigée en mode de réflexion et de questionnement : même quand tous les voyants sont au vert, le risque demeure. Les professionnels ne sont pas maîtres de tout : comment réussir à accompagner des groupes de plus en plus hétérogènes ? La montée de la violence relève aussi d’évolutions sociétales, dont les soignants comme les équipes éducatives sont les premiers témoins (p. 24). L’inclusion permet à de nombreux élèves en situation de handicap de faire leur entrée dans les écoles, laissant place à des enfants aux profils plus complexes, ou à des problématiques multiples dans les instituts médico- éducatifs ; les personnes âgées arrivent de plus en plus dépendantes en Ehpad, conséquence d’un maintien à domicile volontiers sacralisé, des patients issus de la psychiatrie se retrouvent en foyers de vie ou autres établissements médico-sociaux. Devant cette nouvelle donne, les structures font face tant bien que mal. Souvent démunies, mais inventives. Tous auraient besoin du chaînon manquant des politiques publiques : la prévention (p. 36-37). Quand sera-telle privilégiée ? Il y a urgence.

  • Sommaire

ÉTAT DES LIEUX

  • L’une des réalités actuelles du métier, Daniel Faggianelli, maître de conférences en sociologie et Cécile Carra, professeur des universités en sociologie (P.4-5)
  • Postures plurielles, Philippe Giafféri, ancien formateur (P.6-7)
  • Gérer l’agressivité au quotidien, Nathalie Benarroch-Queral, psychologue gérontologue (P.8-9)
  • Le droit, une protection, Étienne Bataille et Muriel Cormorant, avocats (P.10-11)

 

SUR LE TERRAIN

  • Animosités entre résidents, Richard Mesplède, formateur et ancien animateur en Ehpad (P.12-13)
  • Règle absolue : on ne frappe pas Louis Ploton, psychiatre et professeur émérite de gérontologie (P.14)
  • Apprivoiser la souffrance, Manuella Deltour, auxiliaire de vie en unité de vie protégée (P.15-16)
  • Les bonnes questions, Véronique Tapia, assistante de soins en gérontologie et formatrice (P.17)
  • L’échelle Epade, une évaluation rapide, Jean-Claude Monfort, psychogériatre (P.18-19)
  • Une réussite forgée ensemble Manuela Deparis, monitrice-éducatrice (P.20)
  • L’oiseau de mauvais augure Martin Goupil, assistant social (P.21)
  • Violence subie ou volontaire, Gilles Tessens, formateur (P.22-23)
  • Les IME, à l’heure de l’école inclusive, Laurent Duplouy, chef de service, Julie Douchin, assistante sociale, Bertrand Desmons, enseignant et coordonnateur pédagogique, Tiphaine Guiffault, directrice, Mélanie Potier, psychologue et Camille Matte, monitrice-éducatrice, Epdahaa (P.24)
  • Dispositif expérimental innovant, François Beaulieu, chef de service Epnak (P.25-26)
  • Une formation salutaire, Natacha Lamblin, directrice adjointe et Loïc Pirron-Dautriat, responsable des ressources humaines EPMSD (P.27)
  • Les équipes de direction à l’initiative, Sadek Deghima, responsable de service (P.28-29)
  • Décoder les émotions, Stella Choque, cadre de santé et formatrice (P.30-31)

 

MISE EN PERSPECTIVE

  • Tensions psychoaffectives, Cécile Bacchini, psychologue (P.32-33)
  • Apprendre à réfléchir collectivement, Karine-Darnet-Ginot, directrice du pôle enfance 95 La Boussole bleue (P.34-35)
  • Un nécessaire pas de côté, Gaëlle Marie-Bailleul, psychogériatre, médecin référent et coordonnateur du Village Landais Alzheimer (P.36-37)
  • Bientraitance et certification qualité, Cyril Desjeux, docteur en sociologie et directeur scientifique Handéo (P.38-39)
  • Conte de faits de la violence ordinaire, Michel Brioul, psychologue clinicien et formateur (P.40-41)

 

Hors-série ASH N° 22 - Octobre 2022 - 44 pages
11,50
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